Vendredi 13 novembre
PAROLE DE DIEU DU JOUR : 2de lettre de Jean 1,4-9
COMMENTAIRE
Cette épitre de Saint Jean est un des écrits les plus tardifs du Nouveau Testament. Elle reflète la vie des premières communautés chrétiennes traversées par des courants et des pensées religieuses très diverses. « La vérité » de l’évangile est mis à mal par le développement de pensées allant jusqu’à l’hérésie. Voilà ce que veut dénoncer l’auteur de notre texte.
Aussi faut-il ardemment défendre la « vérité de la foi qui repose sur une doctrine solide. C’est ici cela donner sa vie pour le Christ. La première épitre de Jean nous a annoncé que nous « sommes nés de Dieu », et ce par amour, grâce à l’amour de Dieu pour les hommes. Étant nés de Dieu, nous sommes «dans le Véritable», et l’amour selon la vérité jaillit dans nos cœurs. C’est pourquoi l’amour que Jean portait à « la dame élue » et à ses enfants, trouve une place dans le cœur de tous ceux qui, en tant que nés de Dieu, ont été amenés à la connaissance de la vérité. « Le monde » (expression pour désigner celles et ceux qui s’opposent au projet de Dieu ou ne le connaissent pas) est rempli d’erreur et d’illusion, et il nous faut être prêts à souffrir à cause de la vérité. C’est le cas des premiers martyrs. Beaucoup ont en effet souffert, allant même jusqu’à la mort de martyr. Ici il n’est cependant pas question de « souffrir » pour la vérité, mais « d’aimer » à cause d’elle.
Une nouvelle fois, l’auteur de l’épitre révèle le grand commandement que «nous nous aimions les uns les autres» (verset 5 de notre texte).Ce commandement nous est déjà bien familier par la première épître. Ce n’est donc pas un commandement nouveau, quelque chose qui viendrait juste de paraître. C’est le commandement que nous avons eu dès le commencement, depuis le tout premier moment où la vraie lumière a commencé à briller en Christ. L’amour de Dieu a été manifesté en Christ, et il réclamait et produisait l’amour chez ceux qui en étaient les bénéficiaires. IL s’agit alors de se fidéliser toujours plus au commandement de l’amour, en accueillant la grâce d’amour venant de Dieu. Telle est la vraie et solide doctrine sur laquelle nous devons aujourd’hui encore nous reposer.
En ce jour, essayons de nous demander chacune et chacun sur quoi ou pus exactement sur qui repose effectivement notre foi ? P. FB
LA FÊTE DU JOUR : Saint Brice (+444)
On dit qu’il fut recueilli et protégé par saint Martin, mais que Brice quitta le monastère « pour vivre avec de beaux chevaux dans ses écuries et de jolies esclaves dans sa maison. » A la mort de saint Martin, il changea sa manière d’agir. Il lui succéda sur le siège épiscopal de Tours, donnant toute sa vie à l’Église durant quarante ans. Calomnié, accusé d’avoir rendu mère une de ses religieuses, il dut même aller se défendre devant le pape. Mais ses ouailles reconnurent l’innocence de sa vertu et le firent revenir pour qu’il soit à nouveau leur évêque. Ils le canonisèrent dès sa mort.
MÉDITATION
Deux personnes seront dans le même lit…
Il en est qui n’admettent pas que soit juste le jugement de Dieu ; ils imaginent donc un autre Père, qui n’aurait ni souci ni soin de nos affaires, ou même approuverait tous les péchés. Car si le Père ne juge pas, c’est qu’il n’a nul souci de nos actes, ou qu’il approuve tout ce que nous faisons. Du même coup, s’il ne juge pas, tous les hommes seront sur un pied d’égalité et se verront assigner un rang identique. Superflue est dès lors la venue du Christ. Elle est même en contradiction avec l’absence d’un jugement de sa part. Car, précisément, il est venu pour séparer l’homme de son père, la fille de sa mère, la bru de sa belle-mère (Mt 10, 35) ; pour, de deux hommes étendus sur le même lit, prendre l’un et laisser l’autre.
Si donc la venue du Fils, tout en atteignant pareillement tous les hommes, est cependant propre à opérer un jugement et à séparer les croyants d’avec les incrédules – car c’est de leur propre mouvement que les croyants font sa volonté, comme c’est aussi de leur propre mouvement que les incrédules ne reçoivent pas son enseignement –, il est clair que son Père aussi a créé pareillement tous les hommes possédant chacun sa propre capacité de décision et son libre arbitre.
Et à tous ceux qui gardent son amour, il accorde sa communion. Or la communion de Dieu, c’est la vie, la lumière et la jouissance des biens venant de lui. Au contraire, à tous ceux qui se séparent volontairement de lui, il inflige la séparation qu’eux-mêmes ont choisie. Or la séparation d’avec Dieu, c’est la mort ; la séparation d’avec la lumière, ce sont les ténèbres ; la séparation d’avec Dieu, c’est la perte de tous les biens venant de lui.
St Irénée de Lyon
Saint Irénée († v. 200), évêque de Lyon, Père de l’Église grecque, est considéré comme le premier des grands théologiens du christianisme. / Contre les hérésies, V, 26,2 – 27,2, trad. A. Rousseau, Paris, Cerf, 1984, p. 649-651.
Catéchèse du pape François sur les Béatitudes (8)
15 Avril 2020
Chers frères et sœurs, bonjour!
La catéchèse d’aujourd’hui est consacrée à la septième béatitude, celle des «artisans de paix», qui sont proclamés fils de Dieu. Je me réjouis qu’elle arrive immédiatement après la Passion, parce que la paix du Christ est fruit de sa mort et de sa résurrection, comme nous l’avons écouté dans la lecture de saint Paul. Pour comprendre cette béatitude, il faut expliquer le sens du mot «paix», qui peut être mal compris ou parfois banalisé.
Nous devons nous orienter entre deux idées de paix: la première est celle biblique, où apparaît le très beau terme shalòm, qui exprime l’abondance, la prospérité, le bien-être. Quand en hébreu on souhaite shalòm on souhaite une vie belle, pleine, prospère, mais également selon la vérité et la justice, qui s’accompliront dans le Messie, prince de la paix (cf. Is 9, 6; Mi 5, 4-5).
Il y a également l’autre sens, plus courant, dans lequel le mot «paix» est entendu comme une sorte de tranquillité intérieure: je suis tranquille, je suis en paix. C’est une idée moderne, psychologique et plus subjective. On pense communément que la paix est le calme, l’harmonie, l’équilibre intérieur. Cette acception du mot «paix» est incomplète et ne peut être absolutisée, parce que dans la vie, l’inquiétude peut être un moment important de croissance. Très souvent, c’est le Seigneur lui-même qui sème en nous l’inquiétude pour aller à sa rencontre, pour le trouver. Dans ce sens, c’est un moment important de croissance; alors qu’il peut arriver que la tranquillité intérieure corresponde à une conscience apprivoisée et non pas à une véritable rédemption. Très souvent, le Seigneur doit être un «signe de contradiction» (cf. Lc 2, 34-35), secouant nos fausses certitudes, pour nous conduire au salut. Et à ce moment, il nous semble ne pas avoir de paix, mais c’est le Seigneur qui nous place sur cette voie pour arriver à la paix que lui-même nous donnera.
Nous devons alors nous rappeler que la façon dont le Seigneur entend sa paix est différente de celle humaine, celle du monde, quand il dit: «Je vous laisse la paix; c’est ma paix que je vous donne; je ne vous la donne pas comme le monde la donne» (Jn 14, 27). La paix de Jésus est une autre paix, différente de celle du monde.
Demandons-nous: comment le monde nous donne-t-il la paix? Si nous pensons aux conflits belliqueux, les guerres se terminent, normalement de deux façons: soit par la défaite de l’une des parties, soit par des traités de paix. Nous ne pouvons que souhaiter et prier que l’on entreprenne toujours cette seconde voie; mais nous devons considérer que l’histoire est une série infinie de traités de paix démentis par les guerres successives, ou par la métamorphose de ces mêmes guerres en d’autres façons ou en d’autres lieux. A notre époque également, une guerre «par morceaux» est combattue dans plusieurs contextes et selon diverses modalités (cf. Homélie au cimetière militaire de Redipuglia, 13 septembre 2014; Homélie à Sarajevo, 6 juin 2015; Discours au Conseil pontifical pour l’interprétation des textes législatifs, 21 février 2020). Nous devons tout au moins suspecter que dans le cadre d’une mondialisation faite avant tout d’intérêts économiques ou financiers, la «paix» de certains correspond à la «guerre» d’autres. Et cela n’est pas la paix du Christ!
Au contraire, comment le Seigneur Jésus «donne-t-il» sa paix? Nous avons entendu saint Paul dire que la paix du Christ est «de deux, n’en faire qu’un» (cf. Ep 2, 14), annuler l’inimitié et réconcilier. Et la voie pour accomplir cette œuvre de paix est son corps. En effet, il réconcilie toutes les choses et établit la paix par le sang de sa croix, comme le dit ailleurs l’apôtre lui-même (cf. Col 1, 20).
Je me demande alors, et nous pouvons tous nous demander: qui sont donc les «artisans de paix»? La septième béatitude est la plus active, explicitement dynamique; l’expression verbale est analogue à celle utilisée dans le premier verset de la Bible pour la création et indique initiative et zèle. L’amour de par sa nature est créatif — l’amour est toujours créatif — et cherche la réconciliation à tout prix. Sont appelés fils de Dieu ceux qui ont appris l’art de la paix et qui l’exercent, qui savent qu’il n’y a pas de réconciliation sans don de sa vie, et que la paix doit être recherchée toujours et partout. Toujours et partout: rappelez-vous en! Elle doit être cherchée ainsi. Ce n’est pas un travail autonome, fruit de nos propres capacités, c’est la manifestation de la grâce reçue par le Christ, qui est notre paix, qui a fait de nous des fils de Dieu.
Le véritable shalòm et le véritable équilibre intérieur découlent de la paix du Christ, qui vient de sa Croix et génère une humanité nouvelle, incarnée par une foule infinie de saints et de saintes, inventifs, créatifs, qui ont cherché des voies nouvelles pour aimer. Les saints, les saintes, qui construisent la paix: cette vie en tant que fils de Dieu, qui pour le sang du Christ, fait qu’ils cherchent et retrouvent leurs propres frères, est le véritable bonheur. Bienheureux ceux qui empruntent cette voie.
Et de nouveau bonnes Pâques à tous, dans la paix du Christ!